• "Echapper" de Lionel Duroy

     

    De la grâce et de la profondeur, c'est à quoi il faut s'attendre dans le dernier roman de Lionel Duroy. Ce n'est pas nouveau, pourtant il y a néanmoins quelque chose de différent. La colère écrite apaise t-elle le cœur ?

    Après deux ruptures, Augustin n'a plus peur de souffrir. Il se sent libre d'aller où bon lui semble. A la surprise de son éditeur, il part s'installer en Allemagne du Nord, dans le Schleswig avec un objectif fou, écrire la suite de "La leçon d'Allemand" de Serge Lenz.

    «Si j'avais tellement aimé le livre de Lenz au point de vouloir y habiter, c'était que le couple du peintre y porte cette élégance absolue des sentiments qui ne se trouve pas sur la Terre. Je le savais. quelque chose dans ce livre avait réveillé en moi l'enfant lecteur celui qui avait ardemment souhaité, à treize ou quatorze ans, quitter ce monde pour emménager dans celui des livres où parmi la foule des affairistes et des malins surgit invariablement un personnage animé d'une belle âme, je veux dire par là des sentiments forts auxquels il se tient, quoi qu'il lui en coûte. Max Ludwig Nansen et Ditte sont de cette espèce, par leur foi dans le bien dont ils ne dévient jamais ils nous sauvent de l'humanité, du chaos, de la désespérance, et nous donnent l'illusion qu'auprès d'eux nous pourrions aimer la vie. »

    Augustin part seul sur les traces du peintre Emil Nolde, à la recherche des lieux qui figurent dans le roman de Lenz. Il ne retrouve pas toute la vérité du livre mais son envie profonde d'écrire et sa passion pour l'œuvre artistique de Lenz l'obsède. Renoncer ? Jamais ! Comme Emil Nolde, Augustin  choisit de vivre retiré et en harmonie avec la nature. La sollicitude envahissante de sa logeuse l'étouffe et son besoin de solitude pour écrire l'amène à louer pour une bouchée de pain, une maison. Un heureux hasard qui se transforme en coup de foudre !

    «A l'instant où je pousse la porte l'émotion et le plaisir mêlés me font accélérer le cœur. Un plaisir sensuel, intense - songer que cette maison m'est offerte que je suis l'héritier de son histoire, qu'à mon tour je vais lier mon destin au propos silencieux qu'elle tient depuis tant d'années, respirer son air, parcourir ses pièces...»

    Augustin poursuit ses recherches, fouille, rôde, retourne la terre, scrute à la loupe les moindres détails, prend des notes sur tout, interrogent les gens. Puis il rencontre Suzanne qui prépare justement une étude sur Nolde pour l'académie des Beaux Arts. Elle peint aussi. Augustin lui propose de l'aider dans ses recherches. Il est attiré par cette femme qui ne cherche pas à le posséder. Tous deux se comprennent et s'accordent. Leur rencontre prend la forme d'une relation amoureuse.

    A la fin Augustin nous échappe...encore. Il nous invite, surement, à une prochaine BELLE échappée. En attendant, on n'a qu'une envie, prendre un billet de train pour le Schleswig-Holstein, sans oublier de glisser dans sa valise le roman de Lenz. Qu'est ce qui nous en empêche ?

    Ce que j'ai adoré dans "Echapper", c'est la perceptible précision de Lionel Duroy à saisir l'instant présent. Il en prend note sans attendre, pour être dans la vérité du moment. Il libère les émotions et les réflexions avec grâce et sensualité. Il embrasse du regard la beauté des paysages, la beauté de Suzanne. Il s'émeut d'un rien. Chaque détail compte. Et la  juste intensité des mots est un régal.  Son plus beau roman ?! Oui certainement. 

    Fébrile Lionel Duroy ?! Non, délicieusement VIVANT !

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    Editions Julliard - 2015

    Quatrième de couverture : « Vous me demandez ce que Susanne a de plus que vous, je vais vous le dire : Susanne est en paix avec les hommes, elle ne leur veut aucun mal, elle n'ambitionne pas de me posséder et de m'asservir, elle aime au contraire me savoir libre et vivant pour que je continue d'être heureux et de lui faire l'amour. Longtemps, longtemps. Vous comprenez, ou il faut encore que je vous explique ? »

    J'ai lu aussi Le chagrin et Vertiges

     

    (clin d'oeil à Lionel Duroy)


  • Commentaires

    1
    Vendredi 6 Février 2015 à 16:42
    Aifelle

    Comment résister après un tel billet ? yes

    2
    Vendredi 13 Février 2015 à 19:05
    arwen

    j'adore tes critiques de livre avec toujours les mots justes !

    3
    Samedi 14 Février 2015 à 11:16

    Coucou ma Vallia! je viens te souhaiter un joli jour et particulièrement une très douce Saint Valentin avec l'homme de ta vie! Sous la neige-pluie de ce matin, je t'embrasse fort et en contemplant tes belles aquarelles, ça me remet en partance du coup! il faudra bien que je m'échappe à nouveau de mon lieu pour l'ailleurs! Je ne connais pas bien Lionel Duroy mais c'est le titre du livre "Echapper"! Alors cela devrait m'aller bien ! Gros becs et à + ma jolie! glasses

    4
    lm
    Mardi 17 Février 2015 à 08:31

    Superbe. Une invitation au voyage, une invitation au pays de l'art d'écrire ou de peindre, une invitation à la paix intérieure retrouvée... Et quelle fin ! Roman ou réalité ?

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    5
    Vendredi 20 Février 2015 à 17:49

    J'ai également lu le chagrin...


    J'attendrai que celui-ci soit en poche!



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